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Success Stories - Magatte Wade - Entrepreneur en série

Culture(s) : Sénégal


SUCCESS STORIES


Magatte Wade,
36 ans Sénégal, Entrepreneur en série
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"Magatte Wade est représentative d’une nouvelle génération d’Africaines. Une jeunesse qui n’a plus de complexes face à un Occident dont elle connaît tous les codes" (Slate Afrique)

Au lieu d'écrire une chronique sur Magatte Wade comme je le fait habituellement, j'ai décidé de traduire une de ses interventions, parue dans le Huffington Post (lien).


En tant qu'Africaine ayant passée ma vie professionelle aux États-Unis, je suis fier de dire que je n'ai jamais rencontré de racisme ici. Je suis encore plus fière que le peuple américain ait élu Barack Obama, prouvant ainsi, sans l'ombre d'un doute, que la majorité des votants américains se préoccupent plus du mérite que de la race. Je crois sincèrement que les USA sont passés à une situation de post-racisme, et qu'à l'avenir, nous continuerons à faire avancer un monde dans lequel les gens aiment et célèbrent les différences culturelles et raciales. Je me réjouis d'apporter un tel monde à mes enfants, un monde qui les célèbrera pour ce qu'ils sont.


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Avant de m'installer aux États-Unis, j'ai étudié en France, où occasionellement, j'ai pu voir du racisme, précisément chez les vieilles personnes. Un jour, j'ai eu à visiter une dame agée, de la famille de mon ami français. À mon arrivée, elle lui chuchota: "Mais comment va-t'on la nourrir? Je n'ai pas de bananes." Elle n'était pas mal intentionnée mais simplement ignorante, généreuse et confondait les Africains et les chimpanzés. Qu'allons nous faire sans bananes?


Dans la brochure pour un tour au village du millénaire de Jeffrey Sachs, géré par l'un des collègues de Sachs à Columbia University. Règle #1 : "Prière de ne rien donner aux villageois - pas de bonbons, biscuits, bouteilles d'eau, stylos ou argent". Bien que je sois sûr que la règle soit bien intentionée, elle reflète parfaitement cette condescendance révoltante que je ressens pour ce projet Villages du Millénaire. Contrairement à l'ignorante grand-mère, ces célèbres professeurs de Columbia University ne peuvent pas être excusés de leur ignorance. Quand des personnes hautement qualifiées sont capable de nous désigner par un signe si proche de "Ne nourrissez pas les animaux", la seule explication est une arrogance aveugle. Ces gens sont si sûrs de leur noblesse à aider les ignorants chimpanzés qu'ils n'ont même pas remarqué à quel point l'expression était humiliante.


La règle #1 se poursuit par l'explication de cette mesure: "Notre désir est d'encourager la culture de l'entrepreneuriat et la fourniture de services plutôt que la charité". Je le répète, je suis entièrement d'accord avec la culture de l'entrepreneuriat, mais la situation est complétement ridicule - des professeurs américains qui dépensent des dizaines de millions de dollars pour dire à des villageois comment ils doivent vivre leur vie, les touristes américains venant voir la nouvelle attraction du zoo. Attraction dans laquelle les Africains font juste ce que leurs experts américains leur demandent - avec l'avertissement aux touristes de ne pas contaminer le spectacle en nourrissant les animaux. Est-ce ainsi que Sachs compte supporter l'entrepreneuriat africain?


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L'an dernier, en mon statut d'entrepreneur africain vivant aux États-Unis, j'ai été approché par l'un des représentant du projet Villages du Millénaire. Concerné par l'Afrique et soucieuse d'éliminer la pauvreté par d'innovantes idées, j'étais heureuse de rencontrer cette personne et de voir ce que nous pourrions faire ensemble. Imaginez ma surprise lorsque, au lieu de me proposer un partenariat d'affaire sérieux, il s'attend à ce que je lui dévoile mes connections écouler les produits agricoles et artisanaux de leurs villages. J'ai tout d'abord été choqué du fait que l'on puisse produire des biens sans penser à comment les vendre, chose qu'un vrai entrepreneur ne ferait jamais. Ensuite, en tant que femme d'affaire de renom, j'ai acquis une expertise dans la vente qui aurait pu lui être utile s'il avait seulement eu l'envie de de me consulter en tant que spécialiste relevante. Au lieu de cela, il me demande simplement de lui donner mes contacts de ventes et offre de vendre ses produits à ma compagnie - sans respect mon expertise entrepreunariale, ni ma personne, en tant que businesswoman ayant conscieucieusement développé sa réputation. J'ai été vu comme la "femme d'affaire africaine qui sera reconnaissante de travailler avec les professeurs de l'université de Columbia pour mettre fin à la pauvreté en Afrique." Il n'y avait aucun geste de reconnaissance ou de respect pour ma qualité d'entrepreneur.


Dans ma première compagnie, Adina World Beverages, j'ai dû consacrer des années à voyager pour assister à des salons et voir des grossistes dans le but de faire entrer notre boisson au sein de Whole Foods Markets, Wegmans et des dizaines d'autres grossistes. Comme résultat de ces milliers de kilomètres et de ces centaines d'heures de mise en place de relations, j'ai petit à petit construit un réseau effectif pour vendre nos produits. Ma réussite est dûe à une minutieuse observation des tendances du marché, aussi bien que des particularités des acheteurs, aussi bien au détaillant que des distributeurs. En outre, avant même de commencer à vendre mon produit, j'avais déjà défini le concept en me basant sur l'identification d'une opportunité du marché que j'ai cru pouvoir saisir. Le succès qui a suivi dans la vente effective de mon produit fut directement lié à mon identification de la niche précédant la création de l'entreprise. Je savais que la les gens, cultivés et créatifs, feront un lien entre le produit et l'histoire que je promouvais.


Au contraire, Sachs a commencé avec un concept vaniteux "save the Africans", a obtenu des dizaines de millions de donations pour ses projets ($50 millions de Soros, $15 millions de Bill Gates, etc.) et ensuite est allé tirer le fardeau de l'homme blanc (NDLR : allusion au livre The White Man's Burden de William Easterly, également économiste en développement). Seulement, après avoir dépensé des quantités d'argent, le problème s'est posé: "Oh, peut être devrions-nous trouver une voie pour vendre les produits que vendent les villages que nous encourageons." J'avais déjà vu cette histoire auparavant. Quand j'ai commencé à former des femmes sénégalaises à la culture de l'hibiscus BIO et promis d'acheter leur production, elles ont tout d'abord ri de moi car de nombreuses NGOs les avaient soutenues dans le passé, pour ensuite laisser se gâter la production après la récolte, sans acheteur pour leurs produits. Ces femmes ont été enchantées de voir que, parce que j'avais identifié une niche et suis une bonne vendeuse, l'hibiscus a trouvé un marché. Mais les NGOs et les académiciens pensent rarement en ces termes.


Quand les collègues de Sachs sont venu en espérant que je leur tende mes contacts, ils ne se sont même pas fatigué à m'apporter des échantillons de leurs produits, ni à me fournir des preuves que leurs produits étaient de qualité suffisante pour que je puisse mettre ma réputation en jeu. Non plus qu'ils ont fourni de preuves que leur organisation était capable de fonctionner de manière suffisament sûre pour que je puisse partager mes contacts avec eux. Ils s'attendaient simplement à ce que, parce qu'ils sont de Columbia University, avec des pom-poms girls célèbres et des montagnes d'argent, j'allais désirer partager mon réseau avec eux. Mais pourquoi devrais-je croire que des professeurs de Columbia University soient capable de gérer une chaîne d'approvisionement?


En tant qu'entrepreneur, une grande partie de mon travail est d'identifier des produits appropriés, remplissant mes critères de qualité et alignés avec ma marque. Le fait qu'un représentant d'ONG puisse se pointer à ma porte et m'offrir des produits, pour lesquels je devrais être reconnaissant est tant condescendant que profondément inculte de comment marche les affaires. C'est comme si j'étais allé voir Whole Food Market et avais daigné leur offrir mes produits en leur disant qu'ils devraient en être reconnaissant - désolé messieurs, produire et vendre des produits est un travail dur, gérer une chaîne d'approvisionnement requiert un grande quantité d'expertise manageuriale, de recherche, de travail de terrain. C'est un jeu féroce que l'on ne peut jamais tenir pour certain.


En effet, une partie des qualités d'un entrepreneur sont : la vente. La majorité du monde universitaire et des ONGs n'ont aucun respect ni appréciation pour l'art de vendre. Vivant dans un monde sans compte à rendre, la plupart ne comprennent simplement pas. Si Sachs&Co. veulent supporter les entrepreneurs africains, ils doivent tout d'abord apprendre à concevoir les Africains en tant qu'être humains, ensuite à voir les entrepreneurs africains comme des professionnels avec différentes spécialité. C'est ainsi qu'ils pourront être plus efficace dans le support de vrais entrepreneurs africains dans la création de vrais business. Il y a quelquechose d'irréel dans le fait qu'un groupe de célèbres professeurs, majoritairement des hommes de race blanche, puisse savoir comment rendre les Africains plus entrepreneurs. L'Afrique Noire comme un laboratoire pour les universitaires blancs de New York? Peut être pensent-ils pouvoir en apprendre plus sur comment nous rendre nous, Africains, plus entreprenant, invitant les touristes à venir admirer notre travail, sans nous donner de bonbons?


L'économiste zambienne Dambisa Moyo a reçu beaucoup d'attention pour sont récent livre Dead Aid, dans lequel elle demande à ce que l'aide gouvernementale pour l'Afrique soit stoppée dans les cinq prochaines années. Jeffrey Sachs, le grand avocat de l'aide, critiqua violemment Moyo, argumentant que sa demande entraînera beaucoup de souffrances.


Bien que je sois largement en accord avec les idées de Moyo, sa faille réside dans le fait qu'elle ne propose pas de solutions réalistes, ce qui la rend ainsi très vulnérable aux attaques de Sachs. Le fait est que trop de leaders africains abusent de l'aide extérieure (mais pas tous: je soutiens l'aide apportée au Liberia, je crois en Ellen Johnson-Sirleaf plus qu'aucun autre leader africain). Mais surtout, Moyo ne se concentre pas suffisamment sur l'entrepreneuriat africain et le fait que les Africains eux-mêmes doivent intensifier leurs efforts. L'aide a corrompu l'éthique du travail en Afrique et encouragé la corruption et la manipulation, nous devons travailler ensemble pour identifier et supporter l'arrivée imminente de la troupe de new Cheetah, formée d'honnêtes bosseurs Africains (en honneur à la distinction de l'économiste ghanéen George Ayittey entre la vielle génération de dirigeants Hippo, dépendant de l'aide et de la jeune Cheetah Generation d'actifs entrepreneurs. En passant, Sachs ne crée aucune Cheetah Generation. En effet, il nous ignore).


Cela m'enrage que des américains bien intentionnés, des stars hollywoodiennes aux académiciens tels que Sachs, en passant par les philanthropistes tels que Soros ou Gates, limitent leurs efforts en Afrique en grande partie dans des défenses malencontreuses pour augmenter l'aide etrangère. Au lieu de faire des expériences dans les villages rwandais (et au Sénégal, mon pays) je respecterais plus Sachs s'il supportait les vrais entrepreneurs africains. Bono, pour sa gouverne, est allé au-delà de plan pour plus d'aide en soutenant le commerce, au travers de son programme DATA (Dette, Sida, Commerce, Afrique). Je voudrais voir une nouvelle génération d'Américains intéressés, se concentrant sur une collaboration respectueuse avec de vrais entrepreneurs africains pour créer de nouveaux business à travers l'investissement dans nos entreprises, l'achat de nos produits et services, la vente de produits et services, et travaillant en tant qu'égaux en affaire. La pauvreté en Afrique sera éliminée non pas grâce à l'aide, mais par la création d'emplois, par de vrais entrepreneurs, créant des entreprises de taille modeste qui, en grandissant, créeront des millions d'emplois. Malgré l'avertissement de Sachs de "ne pas nous donner de bonbons, gateaux... ou même d'argent", vous pouvez, en réalité, investir réellement dans le vrai monde des affaires africain. En échange, nous vous proposerons des biens et services de qualité parce que les guépards sont engagé à fournir l'excellence, à échanger une valeur contre une autre et non à se reposer sur la charité.


Vouz pourriez même apprécier un déjeuner d'affaire. Que nous payions le repas ou que vous le payiez, sachez qu'il n'y à pas de problème à ce qu'un vrai entrepreneur africain paie un déjeuner d'affaire. Et en passant, nous mangeons plein d'autres choses que des bananes ;)



Sources:

Dangote Group






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